Ce
programme comprend des propositions qui paraissent « sociales » mais
qui retombent en caricatures de préférence nationale, de chasse à la
fraude et de libéralisme pro capitaliste.
Il y a
peu, Marine Le Pen a qualifié la « TVA sociale » de Sarkozy de « TVA
anti-sociale et patronale ». C’était le titre d’une brochure économique
de la CGT en 2007. Il y a au FN, en 2012, des « gens » qui s’inspirent
et simulent des messages syndicaux et sociaux (comme le dénommé
Soral, « rouge brun », et d’autres…). Leur but est de rendre le
programme du FN présentable chez les travailleurs, en tout cas de jeter
le trouble…
Le programme de santé du FN pour 2012 fait partie de cette démarche.
Des propositions et un « ton » nouveaux
Voici ce que l’on trouve sur le site du FN aux chapitres Retraite et Dépendance :
« Les
retraités et les personnes dépendantes ont le droit d’obtenir de la
collectivité des conditions convenables d’existence comme l’indique le
préambule de la Constitution de 1946. Cette solidarité nationale est
l’expression du lien social qui unit les Français, quelle que soit leur
génération. Elle doit être garantie par la pérennisation du système de
retraite par répartition et par la prise en charge du risque de
dépendance par la Sécurité Sociale. Les difficultés actuelles de
financement des retraites sont liées à l’arrivée à l’âge de la retraite
des générations nombreuses nées après-guerre (dites générations du
« baby-boom »), et l’effort de solidarité nationale doit être, pour
cette raison, temporairement accentué. La question de la dépendance est
quant à elle plus structurelle et liée au vieillissement de la
population ainsi qu’au développement de maladies invalidantes en forte
progression chez les personnes âgées, comme la maladie d’Alzheimer. Les
sources de financement complémentaires à mobiliser en vue de la
pérennisation du système des retraites et de la gestion de la dépendance
ne doivent cependant pas peser sur les salariés. »
Plus loin, dans les propositions on trouvera : « Il est urgent de créer, au sein de la Sécurité sociale [c’est nous qui soulignons],
une cinquième branche dédiée à la perte d’autonomie… Il est exclu que
cette branche repose sur des mécanismes assurant les privés. » Or
c’était le projet de Sarkozy que celui d’une assurance privée
obligatoire à partir de 50 ans… de préférence chez Médéric dont le
délégué général est le frère du président. Ce projet sarkozien est
aujourd’hui en veilleuse comme sait le faire cet hyper-président
activiste et agité. En sera-t-il de même pour sa TVA anti-sociale et
patronale ? De toute façon, quand le venin est lancé, il faut y
répondre !
Dans le programme du FN au lieu de l’assurance privée obligatoire cela donne au contraire : « cette branche se verra confier l’ensemble des moyens financiers et humains mis en œuvre par les départements notamment l’APA [« allocation personnalisée à l’autonomie »] et les moyens des Etablissements de santé [lesquels ?] ». De plus : « les professionnels concernés et les aidants familiaux doivent bénéficier de formations spécifiques [gratuites ? validantes ?] ».
Mais comment financer tout cela ? En augmentant les cotisations
sociales patronales et donc le salaire (socialisé) comme le proposent
les syndicats ouvriers ? Non ! Ouf ! Le patronat peut souffler. En
effet : « le financement de la dépendance bénéficiera de recettes issues des droits de douane augmentés (sortie de l’euro…) »… et d’une « démographie vigoureuse » (sic).
Marine Le Pen et l’IVG
Récemment « Le Pen-fille » a désigné… le Planning familial comme « centre d’incitation à l’avortement »
visant ainsi à le criminaliser. Elle a réaffirmé sa volonté, si le FN
accédait au pouvoir, de dérembourser l’IVG – comme le FN en fit la
proposition de loi en 1986 –, étant par ailleurs pour organiser un
référendum contre l’avortement.
Consciente
de son incapacité à remettre en cause frontalement les acquis de la
loi Veil, Marine Le Pen, voulant progresser dans l’électorat féminin,
valorise les alternatives à l’IVG : l’adoption prénatale, un salaire
parental – qui n’est en réalité qu’un salaire maternel qui vise à
confiner les femmes au foyer –, une politique nataliste d’Etat
dépossédant les femmes de leurs droits à disposer de leur corps.
Cette
charge, totalement compatible avec la politique gouvernementale de
« casse de la santé publique », est une illustration de la stratégie
frontiste, toujours en connexion avec les milieux intégristes.
Le FN reste un danger pour les femmes.
En définitive des propositions et un « ton » bien connus… et délirants ?
Le programme de santé du FN reconnaît que beaucoup de Français renoncent à se soigner : « Il
faut défendre la sécu et la taxe sur les complémentaires santé de
Sarkozy creuse le fossé entre une santé des pauvres et celles des
riches… ». Mais comment lutter ? Comme le « trou » de la Sécu est
bien réel, pour le FN, qu’il n’est pas fabriqué par le système ni par
les exonérations patronales, ni par le chômage, ni par l’industrie
pharmaceutique… « c’est en rationalisant les dépenses et en luttant sans merci contre les abus »… qu’on redressera les comptes de la Sécu. Plus loin, on lit : « La
lutte contre la fraude permettra de diviser par quatre ou cinq ans le
déficit et de faire 15 milliards d’économie. Pour cela, il faudra
mobiliser l’ensemble des services publics (caisses de sécurité sociale,
collectivités, services fiscaux, médecins…). »
Dans
les propositions, ce thème délirant de la fraude est systématisé avec
la proposition de création d’un « secrétariat d’Etat à la fraude » !
Or les
études montrent que la fraude reste de petit volume quand on parle,
comme le FN, de celles des particuliers… et surtout des particuliers
immigrés. Par contre – mais le FN n’en parle pas – la fraude de gros
volume existe : elle est le fait du patronat. C’est une fraude au
financement de la Sécu par « le travail au noir » et par l’énorme
sous-déclaration organisée des accidents du travail (AT) et des
maladies professionnelles (MP). C’est le chantage contre la
déclaration faite au salarié et donc c’est la caisse Maladie qui paye
et non pas la caisse ATMP. Or cette caisse est abondée par le seul
patronat et… miracle !… elle est chaque année en équilibre ! La CGT
chiffre cette fraude patronale à la bagatelle de 10 à 15 milliards par
an. Là est la fraude et pas chez les particuliers ! Un exemple : il y a
en France 100 000 opérations du canal carpien par an. Or 10 000
seulement sont déclarés en AT. Les 90 000 restants sont sans doute le
fait de joueurs ou joueuses de golf ! Non, c’est le fait des câbleuses
auto, caissières, etc.
Pour
en finir avec la fraude et le délire FN quand il y a fraude dans les
soins aux particuliers c’est le fait des professionnels eux-mêmes comme
médecins, kinés ambulanciers… médecins surtout grâce au paiement à
l’acte et donc à la multiplication des actes et aux dépassements
d’honoraires… organisés par les syndicats médicaux libéraux et… le
gouvernement ! Pas un mot de tout cela dans le délire à la fraude (des
immigrés) du FN !
Ce « secrétariat d’Etat à la fraude », annonce le programme du FN sur la santé, devra « supprimer
les cartes Vitale frauduleuses qui engendrent une consommation de
soins illégale de personnes venant en France… pour se faire soigner ». Il faut, poursuit-il, « passer à la carte Vitale biométrique et au regroupement des fichiers », « désactiver les cartes surnuméraires », ceci passant par la « lutte contre les faux papiers » qui ouvrent des « droits illégaux aux soins » pour les « clandestins ». Il faut, bien sûr, « supprimer l’AME [« aide médicale d’Etat »] qui est donnée au migrants clandestins ». Il faut aussi « une lutte vigoureuse contre les arrêts de travail de confort et les récidivistes n’auront plus accès aux dispositifs d’aides », que « les collectivités territoriales doivent aider à les localiser ».
Dans ce programme de santé du FN, la lutte contre le gaspillage va jusqu’à la recommandation de « la vente au détail des médicaments prescrits contre les contingentements trop importants, source de gaspillage… ».
On y trouvera enfin une insistance pour la lutte contre la maladie d’Alzheimer. Et comment cela sera-t-il financé ?
« Les économies réalisées grâce à la suppression de l’AME seront affectées aux malades et à leurs familles… ». Quant aux médicaments anti-Alzheimer, même imparfaits, ils ne seront pas « déremboursés ».
Il est proposé « un desserrement du numérus clausus des facultés de médecine pour pourvoir aux besoins de soins qui augmentent… »,
mais avec du personnel français formé en France. Tout recrutement d’un
personnel étranger ne doit être possible qu’après démonstration de
l’absence d’un « National apte ». s’agit-il d’établir les besoins de santé démocratiquement ?
Non !
Mais pour une surveillance du système de santé, les Agences régionales
de santé (ARS) seront… renforcées ! Rappelons que le mouvement syndical
propose leur suppression ainsi que l’abrogation de la loi HSPT dite
Bachelot et de la tarification à l’acte dite T2A.
En conclusion
Le
programme de santé 2012 du FN fait part de préoccupations sociales
étonnantes. Mais il retombe sur ses pieds xénophobes en discriminant
l’immigré, l’immigré source de fraude et de grand déficit.
On peut penser qu’il a été écrit à deux mains.
D’un
côté l’équipe mariniste avec ses pseudo-ouvertures et critiques pour
autant jamais anticapitalistes. Par exemple, pas un mot sur les
exonérations patronales par rapport à la Sécu. De la même façon, dans le
programme général, le FN propose 200 euros d’augmentation de salaire…
Non pas payée par le patronat mais par l’Etat lui-même, c’est-à-dire
les salariés et leurs impôts.
D’un
autre côté l’équipe Gollnisch, galaxie des droites réactionnaires et
ultra-libérales, religieuses… avec son « secrétariat d’Etat à la
fraude » comme solution délirante. Il y aurait un tournant en faveur de
la laïcité des marinistes. Mais comme pour l’IVG et les femmes, ceci
est purement instrumental, ici pour un autre délire, le délire
islamophobe… ce qui rejoint la défense des « civilisations qui
n’oppriment pas les femmes » de Guéant contre celles (l’islam) qui…
Au total
On
assiste donc à une transformation du discours du FN, en apparence
chaotique. Il parle de retraite à 60 ans, de défense des services
publics, mais il épargne le patronat national ; les PME et TPE sont à
soutenir et… la dette publique doit être payée… en la
« nationalisant », en utilisant « l’épargne des Français »… Pas celle
des patrons ?
L’analyse
du programme de santé 2012 du FN montre bien ses incohérences et les
deux faces de son discours : social et national… national-socialiste,
disait-on dans les années 1930. Au-delà reste le crédo de la droite
extrême : pro-capitaliste et nationaliste.
Cette
évolution trompeuse du FN doit être analysée collectivement par les
organisations syndicales et politiques du mouvement ouvrier et du
mouvement féministe que le FN a comme première tâche de détruire… pour
le bien du capitalisme.
C’est
ce qu’un récent colloque – très intéressant – de l’Institut d’histoire
sociale de la CGT, a commencé à faire. Des colloques (et actions) sont
souhaitables entre la CGT, la FSU et Solidaires pour faire tomber les
masques du FN en 2012. Nous avons souhaité que ces quelques lignes
d’analyse participent à ce travail commun.
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